Il faut sauver le soldat généraliste...
Je me demande finalement dans quoi je me lance. Je n'arrête pas d'entendre partout qu'il faut revaloriser la médecine générale, même Bachelot veut soutenir les généralistes avec ses projets de loi.
Mais que se passe-t-il réellement en pratique dans notre beau pays ?
Je ne peux pas encore parler de la profession libérale en elle-même, car je deviens tout juste interne. Je pense qu'il y a suffisamment de médecins qui essaient d'alarmer tant bien que mal nos chères institutions.
Moi je peux juste parler à ma hauteur : celle du regard des étudiants en médecine sur la médecine générale. Depuis qu'on est des bébés-docteurs, on vit dans une atmosphère impropre à la médecine générale. On passe notre temps dans des CHU, dans des services de spécialité, avec des spécialistes qui pètent pour certains beaucoup plus haut que leur cul ; et la seule version qu'on peut avoir de ce type d'exercice est celle que les spécialistes nous donnent, eux, alors qu'ils sont bien incapables d'en parler vu qu'ils n'en font pas partie !
Depuis 2006, il paraît qu'il y a des efforts de fait pour valoriser la filière de médecine générale. Comprendre : faire naître des vocations parce qu'on en manque sérieusement. Seulement, moi, à mon petit niveau de bas d'échelle, je peux témoigner.
Ils sont où, ces fameux stages chez le praticien ? Moi je n'en ai pas vu un seul. Et les postes de clinicat ?? Seulement 8 en 2008 ?? Et combien en spécialité, histoire de comparer ?
Je suis bien consciente qu'il faut du temps pour développer une filière universitaire de cette envergure, mais a-t-on compris que c'était assez urgent ?
Tout cela pour illustrer le fait que l'énoooooorme majorité des étudiants en médecine qui arrivent au bout de leur externat est absolument indifférente à la médecine générale, et pire encore, prie pour y échapper.
Les quelques vocations qui persistent sont souvent ébranlées lorsque le classement à l'ECN est brillant et permet, finalement, de tenter une spécialité.
Pourquoi tenter l'impossible, quand un avenir qui apparaît plus facile s'ouvre devant nous ?
L'amphi de garnison représente parfaitement cette idée de presque "dégoût" qui anime les étudiants envers la médecine générale. La majorité des étudiants classés parmi les 1000 premiers préfèrent tenter une spécialité, et rares sont les courageux qui persistent et signent en osant prononcer le mot fatidique "médecine générale".
Ainsi, une bonne moitié (ou les deux tiers, soyons fous) de nos futurs médecins de ville le sera devenue contrainte et forcée, car les résultats à un concours national quelques années auparavant n'auront pas été à la hauteur des espérances.
Comme si on était revenus quelques décennies auparavant, quand les spécialistes représentaient la classe supérieure de la profession, et que les généralistes n'étaient que de simples "officiers de la santé".
Voir l'émission "Le magazine de la santé" à 21 min environ : http://www.france5.fr/magazinesante/video.cfm?file=http://www.france5.fr/images/emissions/009588/13/magsante_20080917.asx#
Quel est l'avenir de la médecine générale ? Est-on véritablement lancé sur une pente, jusqu'au crash final ? Quelles solutions-miracle apporter, afin de la sauver, et de susciter des vocations parmi les étudiants ??
Je ne peux pas me dire que j'ai fait le mauvais choix. Je me vois depuis si longtemps en tant que médecin de proximité, de famille, de confiance. Presque quelqu'un de la famille, finalement.
J'espère juste que l'avenir nous montrera une profession sous de meilleures augures, avec de l'épanouissement pour chaque praticien.
Une passion, un métier, oui. Un sacerdoce, non.