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L'internat en général...
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18 juin 2009

Y'a des jours comme ça...

    Les jours s'enchaînent et ne se ressemblent pas. Du moins, les patients ne se ressemblent pas.
Ma routine est la même chaque matin, et j'avoue que je préfère de loin le rythme des urgences, qui me permettait d'avoir une journée entière à moi une fois de temps en temps.
Là, dans un service de médecine, je suis obligée d'être présente chaque matin. Certes, je peux sortir tôt parfois, mais néanmoins je ne suis pas du matin. C'est tout.

    Des patients, en veux-tu en voilà, des entrants, des sortants, chaque jour. Des visites, des contre-visites, des gardes et des astreintes. Et on réenchaîne tous les jours.

    Des gens différents, des pathologies différentes ou semblables, mais toujours vécues différemment. Des familles, des contextes, des conclusions différentes. Toujours avec le même degré d'émotion de votre dévouée jeune interne qui n'a toujours pas compris le mot "distance".
Et qui est fatiguée ce soir.
Fatiguée de cette routine que j'effectue chaque jour.
Fatiguée de l'enchaînement de ces patients et de ces maladies qui changent chaque jour.
Fatiguée de vivre l'hospitalisation avec chacun de mes patients.
Fatiguée, tout court !

    Aujourd'hui, je suis de CV. Pas trop de sortants, je suis soulagée, ça me fera pas trop d'entrants à gérer dans l'après-midi.
Des familles à informer, rassurer et éclairer.
Des patients qui vont un peu moins bien, ou qu'il faut surveiller d'un oeil attentif.
Des nouveaux à apprivoiser, avec leur parcours à retracer, celui qui les a amené ici.
Des comptes-rendus à dicter, encore et toujours, au travers de ce magique instrument qu'est le dictaphone.

    Et puis il y a lui, Mr M., 82 ans, mon dernier entrant.
Insuffisant rénal chronique terminal, qui vient pour pneumopathie et prostatite qui ont décompensé ses reins déjà fragilisés.
Et le petit-fils qui vient m'agresser dans mon poste de soins, dans mon havre de paix, là où normalement les gens sans blouse restent dehors, là où je peux rester tranquille.
Et qui me dit fébrilement que son grand-père veut mourir chez lui. Mourir chez lui. C'est tout.

    ...
Je soupire en me disant que je ne vais pas arriver à aller le voir, celui-là. Pas envie de me confronter encore à une histoire triste, et à me faire kidnapper par une famille avide de questions.
Et pourtant je n'ai pas le choix.
Je ne peux pas imaginer faillir à mon rôle, surtout pas maintenant, surtout pas pour eux. Au contraire. C'est dans ce genre de situations où je dois tout maîtriser. C'est là qu'on a besoin d'un vrai docteur, pas d'une loque émotive dégonflée.
Alors je me regonfle, et j'y vais. J'écoute la famille, j'écoute le patient. Je ne tremble même pas. Je compatis, je suis touchée par leur message qui est ô combien recevable. Puis je parle, j'explique qu'il faut encore quelques jours histoire de tout mettre en place. C'est un réseau, il faut que tout soit fait dans de bonnes conditions afin qu'il parte tranquille.

    C'était facile, finalement. Il faut savoir rester professionnel, comme je n'arrête pas de le dire.
N'empêche, je suis super fatiguée. Et puis enchaîner les visites avec des gens qui me sortent qu'ils veulent mourir chez eux, pas tous les jours, ce serait sympa pour le moral.

    Y'a des jours comme ça...

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